Le diocèse de Montpellier, en 2021, a pris l’initiative heureuse de lancer une consultation auprès de tous les chrétiens, individuellement ou en groupes: comment voir les paroisses et le diocèse dans 10 ans?
Un questionnaire guidait les réponses, de manière à pouvoir ensuite faciliter des synthèses.
Voici donc des extraits de notre contribution à cette consultation.
Nous tenons d’abord à remercier les instances diocésaines à l’initiative de cette consultation, qui nous paraît pertinente et courageuse.
C’est pourquoi nous nous attachons à être sincères, réalistes et fraternels. C’est aussi que l’avenir de notre paroisse et de notre Eglise diocésaine nous est précieux.
Les réponses seront sans doute très variées, voire contradictoires.
Nous espérons que la synthèse diocésaine aura la volonté de rendre compte des avis, même vifs, ou divers, plutôt que de faire une moyenne tiède et édulcorée. Cf. Ap. 3,16. Ce n’est pas toujours la prudence timorée qui doit guider les décisions d’avenir.
Nous gardons confiance, et accompagnerons par la prière les temps des décisions à venir.
III a) • Qu’est-ce qui rend plus difficile l’annonce de l’Évangile là où je suis ?
- b) • Quelle est l’aide que j’espère et celle que je puis offrir ?
- c) • Pour répondre aux défis énumérés ci-dessus et pour vivre une conversion pastorale, à quelles transformations sommes-nous appelés localement ou dans notre diocèse ?
III a) Qu’est ce qui rend plus difficile l’annonce de l’Evangile là où je suis ?
Nous pourrions évoquer bien sûr la sécularisation de la société, la culture matérialiste et consumériste, la moquerie des médias et des réseaux sociaux, la passivité des chrétiens que l’on a habitués à se taire, la faillite d’une génération qui n’a pas su faire la transmission pour les parents actuels, les contraintes économiques qui envahissent les soucis de beaucoup,….
Mais annoncer l’Evangile, c’est annoncer l’Eglise Catholique, pour notre entourage. Or, ses prises de position, ses scandales, (Mt.18,6) repoussent les adhésions et les sympathisants ; « Nous t’entendrons là-dessus une autre fois ! »Actes, 17, 32. Ce qui rend surtout difficile l’annonce aujourd’hui, c’est l’image très négative de l’Eglise dans l’opinion.
- b) L’aide espérée est une évolution, une rénovation du fonctionnement de l’Eglise et de ses prises de parole.
Ce que nous pouvons offrir est une modeste coopération d’influence pour faire évoluer la mentalité de l’Eglise, et la mentalité vis-à-vis de l’Eglise.
- c) Nous sommes appelés localement et dans notre diocèse à une transformation progressive mais complète qui intègre les laïcs, et notamment les femmes, à toutes les instances et les temps de concertation et de décision pour le fonctionnement et la gestion de l’Eglise, et de l’action pastorale. (présence paritaire dans les conseils diocésains ; nomination des curés,…)
IV a)• Comment voyons-nous notre paroisse, service, mouvement dans l’Église diocésaine à l’échelle de 10 ans ?
- b) • Qu’est-ce que je suis disposé à changer en ce qui me concerne ?
c)• Autour de moi, puis-je appeler de nouveaux ouvriers pour la moisson ?
d)• Comment puis-je concrètement aider les prêtres dans l’exercice de leur charge pastorale et ainsi leur permettre d’avoir un rôle plus missionnaire ?
IV a) Eglise diocésaine à 10 ans…
Nous ne sommes pas optimistes sur l’avenir de l’Eglise diocésaine, et en France. Car elle semble avoir tourné le dos délibérément à l’évolution des mentalités sociales occidentales, ne satisfaisant qu’une petite minorité de chrétiens traditionnels rigoristes.
Comment un jeune et adulte, instruit et intelligent, peut-il vouloir devenir prêtre en étant privé d’intimité familiale, de travail professionnel, invité à une distinction vestimentaire, et surtout tenu à un vocabulaire inaudible et à transmettre des discours obscurantistes (infaillibilité, virginité de Marie, assomption, transsubstantiation, noces de l’agneau, indulgence plénière ou pas, canonisation, anges, purgatoire,…) ?
La paroisse, l’Eglise, ne pourra plus dépendre ou être supportée par des prêtres tels qu’actuellement.
Dans chaque ville, quartier, village ou petit groupe de villages, les chrétiens s’organisent pour se partager les services nécessaires à la vie paroissiale. Quand cette organisation est en place, un prêtre référent est désigné pour les actes qui ne peuvent encore être accomplis par des laïcs.
- b) Disposés à changer ? Ou : Qu’est ce que le diocèse est disposé à nous laisser changer ?
Nous avons conscience que la situation actuelle doit être un souci, une souffrance, pour les prêtres et les évêques, qui voient les églises se vider, les chrétiens présents vieillir, la pratique se limiter aux demandes de baptêmes, mariages funérailles, et encore assez peu. Alors que leur zèle et leur engagement est total.
Nous avons conscience que des changements forts comportent des deuils, des renoncements, des ruptures difficiles à supporter, voire à imaginer. Mais faisons un rêve. Et si notre diocèse devenait pionnier dans l’invention de nouvelles communautés ?
Concrètement, nous sommes disposés à recevoir des sacrements de la main de laïcs formés et mandatés (onction des malades, baptêmes, mariages, confirmation ) ; nous sommes disposés à recevoir des sacrements de manière collective, et dans un autre lieu que notre propre village ; nous sommes disposés à avoir des prêtres mariés, à avoir des prêtres femme, à avoir des prêtres à temps partiel , à avoir des diacres femme,non seulement pour compenser la faiblesse des vocations d’hommes, mais simplement au nom de l’égale dignité des femmes et des hommes pour l’Evangélisation. Nous sommes disposés à nous former pour des ministères rénovés et pluriels ; nous sommes disposés à des assemblées de célébrations avec ou sans communion, sans présence de prêtre, y compris pour les funérailles ou pour les fêtes liturgiques. Nous sommes disposés à accueillir des propositions neuves. Le partage des prêtres entre pays et continents est légitime et fraternel et admirable, mais il ne résout pas durablement les difficultés, et ne fait qu’esquiver et retarder les changements indispensables à terme.
- c) Autour de nous, nous ne pouvons pas prendre la responsabilité de suggérer un choix de prêtrise dans les conditions actuelles.
Nous pourrions appeler les chrétiens à être plus actifs, si nous avions la perspective d’une organisation plus démocratique, moins sexiste, plus en phase avec la culture sociale actuelle. Bien sûr, il ne s’agit pas de tout accepter des courants sociétaux : les chrétiens ont un rôle d’alerte, de refus, de témoignage de valeurs sur la justice, l’équité, la fraternité, le respect de la dignité de chacun, le respect de la création…Mais le Christ était de son époque, avec un langage de son époque, tout en la faisant évoluer.
- d) Le rôle missionnaire est de tous les baptisés. Le prêtre, devenu rare, risque d’être limité aux gestes sacramentels qui lui sont réservés si les laïcs sont toujours dans l’incapacité de les accomplir.
Mais des avancées théologiques sont possibles à cet égard. Actuellement, l’action des laïcs est restreinte aux tâches et aux services, et l’Eglise s’est privée de l’engagement sacerdotal des femmes. Nous ne savons pas que proposer sans espérer des changements fondamentaux théologiques et organisationnels.
Nous pensons que le rôle missionnaire n’est pas de ramener des pratiquants à l’Eglise ou de rameuter des donateurs financiers, mais de coopérer à une société plus juste et fraternelle, même en dehors de toute conviction religieuse.
Nous avons un peu l’impression que cette question veut en fait nous dire : « Laïcs, faites plus de choses pratiques, pour que les prêtres qui restent soient plus libres pour leurs nobles services » et ce n’est pas la voie à suivre, sauf dans l’urgence immédiate.
17 mars 2021